Patric NOTTRET   POISON VERT

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Extrait de l'interview de Patric Nottret par Le Grand Livre du Mois

 

Le Club reçoit Patric Nottret
Interview du 12/06/2002

Le Club : Comment se lance-t-on dans l'écriture d'un thriller écologique ?

Patric Nottret : En observant l'émergence d'une nouvelle criminalité de type mafieux, encore mal connue, qui porte atteinte à l'homme à travers son environnement. Cela m'a incité à écrire une intrigue policière ayant l'écologie et la nature comme thèmes centraux, mais dans laquelle sont aussi privilégiées l'action, la science et l'aventure. Et puis j'ai choisi de traiter ce sujet grave de manière parfois humoristique, avec des personnages un peu décalés, rebelles et insolents. Les enquêteurs de la FREDE (la brigade spéciale des fraudes et délits sur l'environnement) sont une poignée d'écoflics terrés dans le sous-sol du ministère de l'environnement, mal équipés, mal payés. Pourtant, ils luttent avec conviction contre des adversaires bien plus puissants qu'eux. Au fil de l'enquête, ils vont découvrir, très loin de chez eux, un monde mystérieux, souvent très violent dans lequel rôde parfois la magie.


Le Club : Est-ce davantage votre formation d'agronome conjuguée à votre passion pour les sciences naturelles ou un immense amour du polar qui vous ont guidé ?

Patric Nottret : Les deux... C'est vrai que je suis un grand consommateur d'histoires policières. J'aime les intrigues bien ficelées, surtout quand on y trouve de l'action, de l'aventure et du fantastique. Mais j'attends également d'un livre qu'il m'apprenne des choses nouvelles. Je suis aussi un passionné de la nature et des sciences naturelles. J'ai également dirigé pendant un certain temps un petit bureau d'étude spécialisé dans les problèmes d'environnement. Je me suis inspiré de cette expérience pour écrire Poison vert.

Le Club : Ecoflic de profession, votre personnage phare, Pierre Sénéchal mèle humour et professionnalisme. Ne craint-on pas de tomber dans les caricatures des Colombo et autres inspecteurs mythiques lorsqu'on est encore en pleine écriture ?

Patric Nottret : Si j'ai réussi à créer un personnage qui puisse s'apparenter à ces détectives de légende, j'en suis extrêmement flatté. Mais Pierre Sénéchal est un enquêteur moderne, très au fait des dernières technologies, bien qu'il s'en défende. Légèrement déjanté, il possède une verve et un humour féroces, et entretient des rapports difficiles avec l'autorité en général. A la réflexion, il partage peut-être avec Colombo ce côté faux dilettante, très dangereux pour les criminels qui s'y laissent prendre. Mais je crois savoir qu'il admire Sherlock Holmes, dont il est loin, hélas, de posséder les bonnes manières...

Le Club : Des laboratoires pharmaceutiques qui payent des mercenaires pour voler les pays du tiers monde... Selon vous, est-ce d'actualité ou davantage prémonitoire ?

Patric Nottret : C'est malheureusement d'actualité. Constatés encore assez récemment, ces actes de " biopiraterie " sont pourtant peu connus du public. C'est une forme de criminalité en col blanc qui peut générer d'immenses profits. Ce sont des hold-hup commis sur le patrimoine de l'humanité. Ce qui est peut-être prémonitoire dans Poison vert, c'est d'imaginer que des vols de matériel génétique, dans des pays pauvres, puissent un jour engendrer des meurtres ou des exterminations, pour une poignée de feuilles vertes.

Le Club : Comment envisagez-vous l'avenir proche de notre planète, écologiquement parlant ?

Patric Nottret : Pour certains, le monde est une simple marchandise, qu'on peut piller sans vergogne pour le profit immédiat, et sans se soucier des effets à long terme. Que vont-ils laisser à nos enfants ? Heureusement, la prise en compte des problèmes de l'environnement est aujourd'hui largement répandue, et il y a des avancées dans ce domaine. Cependant, je pense qu'il est urgent. que des gens extrêmement vigilants et formés s'occupent de cette nouvelle criminalité. Comme le dit souvent mon détective, Sénéchal, à ses collègues, en plagiant honteusement Superman : "la planète a besoin de nous".Le Club : Comment acquiert-on, pour un premier roman, la maîtrise extraordinaire dont vous faites nécessaire à tout polar qui se respecte ?
Patric Nottret : Votre compliment me touche beaucoup. J'ai essayé en tout cas de construire une intrigue originale. C'est effectivement mon premier roman, mais j'ai déjà écrit de courtes pièces radiophoniques : petits polars, pièces dialoguées un peu loufoques. Cela m'a peut-être aidé pour le rythme, et pour écrire les dialogues de mes personnages.

Le Club : Lorsque l'on signe un livre aussi singulier, est-ce le livre d'une vie, ou le début d'une longue série?

Patric Nottret : Je dois reconnaître que je me suis beaucoup attaché à mes personnages, et j'ai déjà envie de les retrouver. Les crimes contre l'environnement ne vont pas, hélas, s'arrêter demain. Ils vont même sans doute se multiplier et s'aggraver. Je pense que Sénéchal et ses écoflics ont encore pas mal de pain sur la planche.

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Marie Lusinchi©2002