Patric NOTTRET   POISON VERT

 

PREMIER ROMAN : POISON VERT DE PATRIC NOTTRET

De la jungle parisienne a la foret sud-americaine

Dans l'interminable liste des thrillers qui plombent les sorties estivales, il y a heureusement quelques perles qui sortent de "l'ordinaire serial killer".

Par Bernard Chappuis

Ce n'est pas tant la couverture de Poison vert qui sollicite l'attention mais plutôt l'argumentaire de l'éditeur. "Le résultat se situe quelque part entre les aventures de Pepe Carvalho, les thrillers de Michael Crichton et "A la poursuite du diamant vert" !" Avec ce premier roman, Patric Nottret est à la hauteur du compliment.

"L'animal le plus dangereux de la planète juste après l'inspecteur des impôts est un petit cône, un escargot marin aux couleurs splendides qui pratique l'art de la sarbacane et qui a inventé bien avant nous la seringue jetable." Cette précision lâchée entre deux roupillons par Serge "Lucrèce" Méjaville, un chimiste à l'embonpoint sympathique et portant, sous toutes les latitudes, un noeud papillon (dort-il avec?) donne le ton. C'est drôle et plein d'anecdotes insolites sur le monde végétal et animal. Agronome de formation, Patric Nottret se retrouve sans doute un peu dans Lucrèce mais aussi dans son héros, Pierre Sénéchal. La quarantaine athlétique, cet ancien militant écologique est affecté à la Section de répression des fraudes et délits sur l'environnement (FREDE). A l'évidence, il n'est pas près de manquer de boulot. Côté culture, il vénère Mozart mais l'assassine en sifflotant son répertoire lyrique et cite volontiers Shakespeare dans la conversation. "Allez, "Oeil de triton, orteils de grenouilles" comme disent les sorcières de Macbeth, version Sénéchal". Le détective est appelé dans la forêt de Chevreuse où un homme a été assassiné. Ce n'est pas tant le décor qui explique la présence de l'"écoflic" mais la découverte de cinq feuilles vertes et des graines qui ne sont pas censées exister. D'où deux questions qui se posent d'entrée; d'où proviennent ces feuilles et qu'est-ce que le mort inconnu voulait en faire?

En Amazonie, il existe 80 000 espèces de plantes à fleurs, explique à Sénéchal une adorable vieille botaniste. "Nombreuses sont celles qui rentrent dans les recettes thérapeutiques des chamans. Quelle chance aurais-tu, si tu étais médecin, mon chou, de préparer une de ces recettes sans te tromper? Quelle partie utiliser ? A quelle dose?" Or ces plantes aux phénoménales propriétés intéressent grandement certains labos pharmaceutiques. Remontant cette piste verte, Sénéchal et Lucrèce vont finir par débarquer en Guyane puis au Surinam. Un pays recouvert par la jungle où "le père Bon Dieu roule ses barriques", où "la vie n'est pas toujours hydraulique". Un coin encore qui pique la curiosité avec sa faune armée (moustiques, sangsues, araignées, scorpions, reptiles, vampires, scolopendre, etc.) et ses mercenaires en état de guerre. De quoi être vert de peur.

On attendait depuis longtemps un thriller qui marie l'humour et l'aventure, l'érudition et la fiction. Un petit bémol peut-être? L'explication finale s'avère un peu longue. Un détail qui n'enlève rien au plaisir de la découverte d'un nouveau sous-genre, l'"écopolar".

 

24 heures, le 4 juin 2002
 

 


Marie Lusinchi©2002